Alors que les pays occidentaux cherchent à établir un système de traçabilité pour sanctionner les diamants russes, De Beers pousse pour l’adoption de sa plateforme Tracr. Le groupe minier a recruté une société de lobbying pour faire valoir ses arguments auprès des décideurs politiques américains.
Depuis plusieurs mois, le G7 prépare un projet d’interdiction des importations de diamants russes en guise de sanction contre l’invasion de l’Ukraine en février 2022. Prévue être mise en place à partir du 1er janvier 2024, cette mesure devrait s’accompagner de la mise en place d’un système de traçabilité complet. Elle permettra d’exclure les diamants russes de tous les marchés et de fermer une source de financement de la guerre de Moscou.
Le géant russe Alrosa dans les cordes
Le diamant représente environ 1% de la valeur des exportations de la Russie. Il s’agit de la 13e plus importante ressource du pays, derrière les produits pétroliers, le gaz, l’or ou encore l’aluminium. En 2021, la Russie a exporté pour près de 5 milliards de dollars de diamants, selon l’Observatoire de la complexité économique du Massachusetts Institute of Technology (MIT).
Alrosa, premier groupe de distribution de diamants au monde avant le conflit ukrainien, représente à lui 90 % de la production russe et 28 % du marché mondial. Cette compagnie est détenue et dirigée par des proches de Vladimir Poutine. Elle aurait déjà indirectement contribué à financer la guerre en Ukraine à hauteur de 1 milliard d’euro.
Suivre le diamant depuis son extraction jusqu’à sa commercialisation
Après lui avoir imposé des sanctions l’année dernière, l’Union européenne (UE) et les Etats Unis souhaitent maintenir couper tous les circuits par lesquels ses diamants, ainsi que ceux des autres groupes russes, passent pour se retrouver sur le marché occidental. En effet, certains Etats (l’Inde et le Qatar notamment) masquent l’origine des diamants russes pour les revendre partout dans le monde, comme c’est le cas avec les produits pétroliers.
La mise en place d’un système de traçabilité complet permettrait de retrouver ces pierres précieuses extraites en Russie et de les écarter. Cela obligerait les pays-écrans à ne plus les acheter, puisqu’ils ne pourraient plus les revendre en Europe et aux Etats Unis. Le système de traçabilité doit suivre les traces d’un diamant depuis son extraction jusqu’à sa commercialisation.
De Beers propose sa plateforme Tracr
L’initiative occidentale est conduite par la Belgique, une plaque tournante du commerce du diamant. En effet, 84 % des diamants bruts et 50 % des diamants polis du monde passent par le port flamand d’Anvers. D’où l’empressement de Bruxelles dans cette affaire. Les autorités belges souhaiteraient, de préférence, une traçabilité basée sur la blockchain. Cela permettrait d’enregistrer toutes les transactions d’une pierre de manière sûre et inaltérable.
Qui garantit la provenance de 100 % des diamants
Dans le secteur, il existe quelques solutions très fiables. Notamment Tracr, une plateforme de traçabilité conçue par De Beers, deuxième groupe minier au monde avant les sanctions contre Alrosa. Tracr utilise la blockchain pour fournir l’authenticité et la provenance de 100 % des diamants, contre 20% dans le milieu. Elle combine la technologie des registres distribués et une confidentialité avancée des données pour garantir la transparence sur toute la chaîne. De Beers aurait engagé la société de lobbying Brownstein Hyatt Farber Schreck basée à Washington DC pour renforcer le soutien des politiques américains à la solution De Beers.
Une alliance d’envergure avec Sarine
Le porte-parole de De Beers, David Johnson, a confié à JCK que la compagnie minière travaillait à la construction d’un partenariat solide avec les gouvernements partageant des objectifs et des valeurs communs. Dans le cadre de son offensive de séduction auprès du G7, De Beers s’est associé à Sarine pour développer une solution évolutive visant à suivre les diamants depuis leur source jusqu’au point d’entrée dans les pays occidentaux. Les systèmes de traçabilité de Sarine traitent chaque année plus de 100 millions de diamants, contre 1,5 million pour Tracr.