Coronavirus : le droit de retrait, un dispositif qui fait débat

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Des passagers dans une gare de la RATP, Paris (France).

 

Depuis lundi, des salariés de divers secteurs ont refusé de travailler, invoquant la menace du Covid-19. C’est le cas notamment des employés du Louvre, des chauffeurs de bus et des salariés habitant l’Oise, l’un des principaux foyers. Ce droit de retrait, qui pourrait faire des émules, divise ces derniers jours.

Une mesure légale et légitime

Ce dispositif est prévu par le code du travail. En cas de situation de travail présentant « un danger grave et imminent » pour sa vie ou sa santé, un salarié peut quitter son poste de travail ou refuser de s’y installer, et ce même sans l’accord de son employeur. S’il s’estime face à un danger immédiat ou pouvant survenir dans un délai rapproché, un employé peut « exercer son droit de retrait et interrompre ses activités, et ce tant que l’employeur n’a pas mis en place les mesures de prévention adaptées », indique la Direction de l’information légale et administrative, un service rattaché au Premier ministre.

Avec la progression de l’épidémie du coronavirus, on assiste de plus en plus au recours à ce droit de retrait. Ainsi, le personnel du Louvre  refuse-t-il de travailler. Le musée n’a pas rouvert ses portes depuis dimanche. Lundi, des enseignants de l’Oise de communes limitrophes d’un foyer de contamination ont aussi décidé de ne plus faire classe. Les chauffeurs des sociétés Keolis et Transdev ont suivi. Ils réclament des mesures de protection, comme des gants et des masques, pour assurer leur service en sécurité.

Le recours au droit de retrait divise en France. Pour les syndicalistes, c’est une action tout à fait légitime. « Tout salarié est en droit de cesser son activité après en avoir averti son employeur, s’il estime que les mesures sont insuffisantes pour protéger sa santé, ce qui suscite de l’anxiété, elle aussi nocive à sa santé », rappelle Jérôme Vivenza, responsable de ces questions à la CGT.

« L’employé doit rester à la disposition de son employeur »

L’avocat Pierrick Gardien, lui, temporise en soulignant que la plupart des cas d’exercice de droit de retrait liés au Covid-19 sont « fragilisés juridiquement ». Il appelle à la prudence car, « Même si la situation est inquiétante, on peut légitimement considérer que le caractère « imminent » du danger pour la santé physique de l’agent ne sera pas existant. Ce n’est que dans les zones limitées avec multiplication exponentielle des cas, appelées aussi « cluster », que l’exercice du droit de retrait […] pourrait tenir au contentieux.».

D’ailleurs, un droit d’alerte ne libère pas totalement le salarié de ses obligations. « Ce dernier doit rester à la disposition de son employeur. C’est un droit à se retirer du danger, mais pas un droit à rentrer chez soi », explique la CFDT. Une fois le droit de retrait enclenché, l’employeur ne peut effectuer aucune retenue sur salaires, ni sanctionner le travailleur. Il pourrait, tout au plus, lui imposer du télétravail.

Le droit de retrait, « pas fondé »

De son côté, l’exécutif a pris parti pour les employeurs et pour l’économie française. Elisabeth Borne, la ministre de la Transition écologique et solidaire, a déclaré que « quand les entreprises respectent les consignes [des pouvoirs publics, ndlr], le droit de retrait ne s’applique pas ». Même si elle renvoie représentants des salariés et employeurs au dialogue social, elle considère que le droit de retrait n’est « pas fondé ». La ministre ajoute : «La logique est que toutes les activités essentielles à la vie du pays doivent pouvoir se poursuivre ».

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