Le président reçoit 200 patrons internationaux au château de Versailles pour promouvoir l’attractivité de la France et engranger des milliards d’euros d’investissements.
Un rendez-vous devenu incontournable pour séduire les grands investisseurs
C’est dans le faste du château de Versailles, haut lieu du pouvoir symbolique, qu’Emmanuel Macron a une nouvelle fois accueilli les dirigeants des plus grandes entreprises mondiales. Le 8e sommet « Choose France », organisé lundi 13 mai 2025, a réuni près de 200 chefs d’entreprise issus de tous les continents. Parmi eux, des figures de poids comme Larry Fink (BlackRock), Martin Lundstedt (Volvo), ou encore le président de Coca-Cola Europe. En installant cet événement dans ce cadre aussi prestigieux que politique, Emmanuel Macron entend réaffirmer que la France est ouverte, accueillante et compétitive sur le terrain de l’investissement international.
L’objectif de l’exécutif était clair : battre le record d’annonces d’investissements, établi à 13 milliards d’euros en 2023. Il semble atteint. Selon les premières estimations, ce sont plus de 20 milliards d’euros qui ont été promis, dans des secteurs aussi variés que les infrastructures logistiques, l’industrie pharmaceutique, les technologies numériques et les énergies renouvelables. L’exemple le plus emblématique est celui de Prologis, géant américain de l’immobilier logistique, qui prévoit à lui seul d’investir 6,4 milliards d’euros en France, avec la construction de 750 000 m² d’entrepôts d’ici 2028, et la création de plusieurs milliers d’emplois.
Pour accompagner cette édition, Emmanuel Macron a repris avec ironie une expression qui avait fait scandale en 2018 : « un pognon de dingue ». Cette fois-ci, la formule devient un slogan positif. Dans une vidéo diffusée sur les réseaux sociaux, le président s’affiche détendu, en tee-shirt, enchaînant les annonces avec un ton volontiers direct. Une manière assumée de reprendre la main sur la communication, de désamorcer les critiques passées, et de mettre en scène une France attractive, conquérante et moderne.
Une politique de l’attractivité assumée comme priorité économique
Pour attirer ces investissements, Emmanuel Macron et ses ministres n’ont cessé de vanter les réformes entreprises depuis 2017. Réduction de la fiscalité sur les entreprises, assouplissement du droit du travail, simplification administrative : autant de mesures que les investisseurs étrangers perçoivent comme des signaux positifs. Le président se félicite d’avoir fait de la France, selon plusieurs classements européens, la première destination pour les investissements directs étrangers (IDE) sur le Vieux Continent pour la quatrième année consécutive.
L’essentiel des investissements annoncés concerne des domaines jugés stratégiques par l’exécutif : data centers, logistique verte, industrie pharmaceutique, intelligence artificielle et transition énergétique. Cette orientation répond à une double logique : d’une part, faire de la France un acteur central de la réindustrialisation verte en Europe ; d’autre part, renforcer l’autonomie technologique du pays dans un contexte de tensions géopolitiques croissantes. Le gouvernement espère ainsi enclencher un effet de levier dans les territoires, en stimulant la recherche, la formation et l’emploi autour de ces filières.
En complément des annonces économiques, le sommet Choose France est devenu une vitrine diplomatique et médiatique. Chaque année, le château de Versailles se transforme en outil d’influence où les grandes entreprises sont valorisées, les dirigeants écoutés, et les projets exposés en détail. L’exécutif mise sur cet effet d’image, couplé à une narration continue sur les réseaux sociaux, pour convaincre autant les partenaires étrangers que l’opinion publique nationale de l’efficacité de sa politique économique.
Retombées, limites et critiques d’un exercice bien rodé
Parmi les retombées les plus concrètes, le gouvernement met en avant la création de plusieurs milliers d’emplois directs et indirects. Les projets annoncés doivent permettre une implantation sur tout le territoire, y compris dans des zones rurales ou périurbaines. L’investissement de Prologis, par exemple, se fera en grande partie en dehors de l’Île-de-France, contribuant ainsi à la revitalisation économique de plusieurs régions. Cette territorialisation est centrale dans le récit présidentiel, qui entend démontrer que l’attractivité économique bénéficie à tous les Français.
Attirer des entreprises étrangères, oui — mais pas à n’importe quel prix. C’est le pari de Macron : favoriser les implantations dans les secteurs d’avenir, de manière à renforcer la souveraineté nationale. L’accueil de nouveaux data centers, l’implantation de lignes de production de batteries ou encore le développement de laboratoires de biotechnologie visent à bâtir une économie plus résiliente face aux crises. Le président entend ainsi montrer que l’investissement étranger peut servir une stratégie d’intérêt général, loin des logiques purement financières des décennies passées.
Pour autant, les détracteurs du sommet Choose France rappellent que les montants promis ne se traduisent pas toujours en emplois concrets, ni en investissements pérennes. Certains projets tardent à se matérialiser, d’autres ne créent que des emplois très qualifiés, peu accessibles aux populations locales. Des économistes pointent aussi le risque de dépendance à des capitaux extérieurs et l’absence de conditionnalités sociales ou environnementales suffisantes. Enfin, les oppositions politiques dénoncent une mise en scène coûteuse au service d’un président « start-up nation » plus soucieux de l’image que de la réalité industrielle.