La réélection de Donald Trump aux États-Unis suscite de vives inquiétudes en Europe. Protectionnisme, hausse des droits de douane, et renouveau de la fracturation hydraulique marquent un tournant qui pourrait peser lourdement sur les entreprises européennes.
Une dépendance énergétique renforcée
Depuis la guerre en Ukraine et la fin des importations de gaz russe, les pays européens se tournent massivement vers le gaz naturel liquéfié (GNL) des États-Unis, un choix coûteux. Avec le retour de Donald Trump, la production américaine de gaz pourrait être relancée grâce à la fracturation hydraulique, une technique controversée. Cette décision pourrait renforcer l’approvisionnement en gaz pour l’Europe, mais sans forcément faire baisser les prix, car le GNL reste cher une fois liquéfié, transporté, et regazéifié.
Si ce gaz est une solution transitoire pour certains, notamment en Allemagne qui souhaite s’éloigner du charbon, il n’en reste pas moins une énergie fossile. Pour Pierre-André de Chalendar, bien que le gaz soit plus respectueux du climat que le charbon, ce recours ne répond pas aux objectifs européens de décarbonation. En France, moins dépendante grâce à l’énergie nucléaire, l’impact est moindre, mais la dépendance au gaz américain pose une question cruciale pour l’avenir de la transition énergétique européenne.
En relançant la production de gaz, Donald Trump pourrait réduire les prix aux États-Unis, ce qui pourrait indirectement alléger les coûts pour les importations européennes. Néanmoins, en l’absence de production propre et d’une dépendance accrue aux importations, les industries européennes restent vulnérables aux fluctuations des prix de l’énergie, avec un impact majeur sur leur compétitivité mondiale.
Un protectionnisme américain préoccupant pour les entreprises européennes
Dans le cadre de sa politique protectionniste, Donald Trump entend augmenter les droits de douane sur tous les produits importés aux États-Unis. Pour les exportateurs français, bien que moins exposés que les Allemands, cette mesure pourrait avoir des conséquences, notamment pour les industries du luxe, de l’agroalimentaire (vin), et de la haute technologie. Si les consommateurs américains optent pour des produits locaux, cela pourrait réduire la demande de biens européens, augmentant ainsi la pression sur les entreprises exportatrices.
Selon Pierre-André de Chalendar, l’instabilité générée par cette politique protectionniste pourrait renforcer la concurrence des produits chinois en Europe. Face à des États-Unis plus fermés, la Chine pourrait en effet se tourner davantage vers l’Europe pour écouler ses produits, ce qui accentuerait la pression sur les entreprises européennes, déjà affaiblies par les restrictions énergétiques et la crise économique.
Face à l’offensive protectionniste de Trump, la réaction de l’Union européenne reste incertaine. D’après Chalendar, un sursaut d’unité européenne est nécessaire pour défendre les intérêts de l’industrie européenne. Si l’Europe répondait fermement, Trump pourrait revoir sa politique, mais une telle réaction nécessite une entente politique et une vision commune, encore trop souvent absentes.
Pressions fiscales et instabilité budgétaire en France
Dans le budget français pour 2025, le gouvernement prévoit une augmentation des impôts pour les grandes entreprises qui font des bénéfices. Bien que ce projet de loi soit encore en cours de discussion à l’Assemblée nationale, il suscite déjà des inquiétudes parmi les dirigeants d’entreprises, qui redoutent un climat économique encore plus difficile, en particulier dans un contexte international tendu.
Le budget 2025 envisage aussi une réduction des allègements de cotisations, augmentant ainsi le coût du travail pour les entreprises. Pour les chefs d’entreprise, cela pourrait limiter les embauches et affecter l’investissement, ce qui pourrait affaiblir davantage les entreprises françaises face à leurs concurrents internationaux. Pierre-André de Chalendar souligne que cette hausse de la pression fiscale pourrait être tolérable si elle s’accompagnait de réformes structurelles sur la dépense publique, nécessaires pour améliorer la compétitivité nationale.
La cacophonie à l’Assemblée nationale autour de ce budget accentue l’incertitude pour les entreprises. « L’incertitude n’est jamais bonne pour l’économie« , rappelle Chalendar. En effet, pour l’industrie française, déjà en difficulté, ce manque de clarté crée un climat instable qui retarde les prises de décisions et entrave les stratégies de croissance.