Portée par de nouvelles obligations légales et un engouement croissant pour le vrac, l’industrie du réemploi des emballages en verre et plastique s’apprête à créer 30 000 emplois d’ici 15 ans.
Une filière en plein essor portée par les enjeux environnementaux
Derrière le geste anodin de rapporter une bouteille en verre en magasin, se cache une véritable chaîne industrielle. Une fois récupérée, la bouteille passe entre les mains d’opérateurs de tri, est inspectée pour s’assurer de son intégrité, nettoyée selon des protocoles stricts, puis renvoyée aux fabricants pour être réemployée. À ces opérations s’ajoute la fabrication de machines spécialisées dans la déconsignation, ainsi que la gestion logistique et numérique du cycle de vie des contenants.
Aujourd’hui, la filière du réemploi représente environ 8000 emplois en France. Du préparateur de commande au logisticien, en passant par les ingénieurs en traçabilité des emballages, un écosystème solide s’est constitué. Cette dynamique est appelée à s’intensifier à mesure que le réemploi devient un pilier incontournable de la stratégie environnementale nationale, renforçant l’ancrage local de nombreux métiers.
Avec des ressources naturelles sous tension et une opinion publique sensibilisée aux déchets, la transition vers le réemploi offre une réponse concrète. Plus qu’une mode, elle constitue une mutation de fond qui répond autant aux impératifs écologiques qu’aux attentes économiques d’une croissance verte.
Un levier d’emplois considérable à l’horizon 2040
Selon deux études récentes, du cabinet Deloitte et de la Fondation Ellen MacArthur, la filière pourrait générer 30 000 emplois supplémentaires d’ici 2040. Deloitte anticipe 20 000 créations de postes liés au développement du réemploi du verre, tandis que l’extension aux emballages plastiques – lessives, shampoings – porterait ce chiffre à 30 000. Ces projections s’appuient sur l’application imminente d’obligations légales incitant à la vente de produits en vrac et au réemploi d’emballages.
À court terme, l’obligation pour les magasins de plus de 400 m² de proposer des produits en vrac jouera un rôle déterminant. Ce texte devrait stimuler les investissements industriels, multiplier les centres de collecte et créer des postes variés : maintenance, logistique, inspection qualité, développement de logiciels de suivi… Une vague d’embauches rendue nécessaire pour répondre à des volumes en forte croissance.
Dès juin, 750 magasins de la grande distribution du quart Nord-Ouest de la France proposeront des emballages consignés de grandes marques. L’objectif est ambitieux : passer de 13 millions à 50 millions d’emballages réemployés en un an et demi. Cette montée en puissance de l’offre est fondée sur l’idée que la demande suivra, une conviction que partage Célia Rennesson, directrice générale du Réseau Vrac et Réemploi.
Un nouveau modèle industriel qui transforme la grande distribution
La généralisation du réemploi nécessite une réorganisation logistique profonde. Il ne s’agit plus seulement d’acheminer des produits, mais aussi de récupérer les emballages usagés, de les nettoyer, puis de les réinjecter dans le cycle industriel. Ce modèle impose des chaînes d’approvisionnement plus circulaires, plus locales et donc plus résilientes, au service d’une consommation durable.
Le passage au réemploi à grande échelle exige des investissements conséquents : développement de machines adaptées, standardisation des contenants, mise en place de plateformes de tri et de nettoyage. De plus, l’industrie doit surmonter des défis culturels : convaincre consommateurs et distributeurs d’adopter massivement ce nouveau geste de consommation, en simplifiant au maximum l’expérience utilisateur.
L’initiative des grandes surfaces dès 2024 vise précisément à impulser ce changement. En augmentant rapidement l’offre d’emballages consignés, les industriels espèrent entraîner la demande dans leur sillage. Ce cercle vertueux, s’il se confirme, permettrait non seulement de réduire les déchets d’emballage, mais aussi de dynamiser l’emploi local tout en favorisant une production industrielle plus sobre et plus responsable.